La notion de "genres" dans les arts en est une particulière, ne serait-ce que par son application. Dans un esprit de catégorisation pseudo-simple, on attribut des sous-titres, des étiquettes à ce qui est créé au-delà du ressenti, au-delà des idées véhiculées, développées. Pourquoi s'attarder sur la profondeur, alors qu'on pourrait plutôt observer les codes, les éléments de surface qui reviennent d'oeuvres en oeuvres ? C'est après que les sous-genres apparaissent pour catégoriser d'autres catégories, ce qui peut parfois amener des oeuvres hybrides, combinant différentes étiquettes.

Pourquoi ne pas alors parler de ce qu'une oeuvre propose, de ce qu'elle nous fait sentir ?
Super Mario Sunshine est, en théorie, non seulement un collect-a-thon dans le sens que c'est un jeu de plateforme en trois dimensions axé sur la collection d'objets disparates qui permettent de progresser et de débloquer plus de contenu, mais aussi un "jeu de plateforme de Mario en 3D ouvert", selon Nintendo, dans la même lignée que Mario 64 avec Super Mario Odyssée comme héritier.
Ce que ces étiquettes techniques ne parviennent pas à saisir, c'est que Super Mario Sunshine n'est pas exactement un jeu de plateforme dans le sens classique du terme. Certes, n'importe quel speedrunner du jeu vous éblouira avec les actions, les sauts, les glitchs exploités dans l'hilarité et la précision ; ce jeu encourage la vitesse, la fluidité, la maîtrise de sa physique brisée et inconstante.
Pourtant, derrière cette maîtrise, cette vitesse se cache aussi une aventure estivale fortement scénarisée, une aventure lors de laquelle Mario se retrouve à connecter avec des habitant-es insulaires qui ont leur propre histoire à raconter, leurs relations établies.
Pourquoi ne pas parler des enfants Piantas des Collines Bianco qui finissent coincé-es entre les murs et qui sont alors châtié-es par leur mère dans l'épisode 8 ?
Pourquoi ne pas relever le fait que les deux frères Piantas à la peau brun-chocolat du Port Ricco gagnent en puissance au fil des épisodes, offrant raccourcis, mais aussi, dans l'épisode 8, un accès direct à une pièce bleue chacun ?
Pourquoi ne pas rire de l'absurdité d'un père de famille effrayé par tous les manèges du Parc Pinna, grande roue incluse ?

Mario Sunshine est bourré de défauts dans ses épisodes, dans ses défis souvent ridiculement difficiles, dans sa physique hasardeuse, dans son système de progression même, qui requière qu'on finisse les épisodes 7 des sept niveaux du jeu pour accéder à la fin, enlevant de la valeur à tous les soleils...
Et pourtant, derrière un jeu vidéo empreint de décisions douteuses, on retrouve une expérience unique en son genre, qui mise plus sur l'immersion dans un monde coloré et déjanté plutôt que l'avènement du siècle en terme de jouabilité.

Ne plongez pas dans cette mer azure à la recherche de défis inoubliables pour leur complexité et satisfaction, mais plutôt pour sa richesse scénaristique et littéraire, pour prendre congé de l'hiver ou d'une période fraîche et ainsi voyager sur une île paradisiaque qu'on guérit de la pollution amenée par un empire totalitaire...
Oh putain le jeu est une allégorie sur les conséquences de l'impérialisme sur les populations locales.

Reviewed on Oct 10, 2023


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